À la rencontre de… Coline Faulquier.

La jeune cheffe marseillaise vient d’obtenir sa première étoile au guide Michelin avec son restaurant Signature. Une victoire pour cette combattante dont la force de caractère continue de nous surprendre.

Dans sa jeunesse, la cheffe Coline Faulquier ne savait pas que cuisiner pouvait être un métier. Aujourd’hui, la jeune femme réalise un rêve : décrocher une étoile en donnant simplement du plaisir aux gens avec ses petits plats. Certes son parcours n’a pas toujours été un long fleuve tranquille, mais les épreuves ont rendu l’histoire plus belle.

En avant vers la cuisine.

L’enfance de Coline Faulquier ne s’est pas fait dans les fourneaux d’un restaurant, mais dans une maison modeste dans la Nièvre. Un environnement, où elle apprend le don de soi et la générosité avec l’accueil de réfugiés durant la guerre en Bosnie par sa famille, mais aussi la valeur des bonnes choses. Ses parents entretenaient un potager et élevaient quelques bêtes. Sa mère et sa grand-mère cuisinaient très bien, mais à l’époque, jamais la future cheffe n’aurait pu imaginer qu’elle pourrait en faire son métier.

D’ailleurs, elle découvre par hasard, lors d’une discussion avec le fils du patron de son père qu’il est possible de faire une école hôtelière. De suite, l’idée m’a interpellée et je suis tombée sous le charme du projet, même s’il inquiétait beaucoup ma mère. Malgré ses réticences, cette dernière décide de faire confiance à sa fille, car elle connait sa force de caractère. Mais avant d’entrer à l’école, la jeune adolescente va devoir faire un stage d’un mois.

Premier pas.

Pour se faire, Elle quitte le cocon familial et rejoint Séguret dans le Vaucluse. Cette première expérience dans un restaurant gastronomique lui démontre que la passion ne la rendra pas forcément esclave de son métier. Alors, à 15 ans, elle décide de prendre son appartement à Avignon pour être plus proche de son école et de son travail. Le début d’une grande histoire que je n’ai jamais regretté.

Après avoir obtenu son diplôme, elle rejoint Montpellier pour faire un BTS, mais la vision scolaire de la restauration entre comptabilité et administratif ne l’emballe pas. Au bout d’un an, elle préfère tenter sa chance ailleurs. Elle passe et réussit le concours de l’école Ferrandi et décide de monter à Paris.

La grande école de cuisine lui impose de faire un an de prépa avant de rejoindre ses classes. Alors, Coline Faulquier intègre les cuisines du restaurant Lasserre sous les ordres du chef Jean-Louis Domicos. Une épreuve ! Ses premiers pas dans la gastronomie parisienne sont durs mais formateurs. Ensuite, elle continue avec six mois d’étude et six mois de stage qu’elle fait auprès d’Olivier Nasty. Avec lui, je découvre la vie de chef d’entreprise, je me prends au jeu de la création de fiches techniques des plats pour en définir leur coût de revient par exemple.

Pour sa dernière année d’études, Coline Faulquier rejoint Éric Fréchon au Bristol. Après ses études le chef lui propose de rester à ses côtés. L’une de mes plus belles expériences. La connexion entre elle et le chef est si forte qu’elle hésite à partir, mais en 2012 pour des raisons personnelles, elle décide de s’envoler vers le sud.

Direction Marseille.

Son chef la soutient et lui trouve une place à l’hôtel du Castellet, un lieu emblématique pour tous les amoureux de sport automobile. Elle œuvrera pendant deux ans dans les cuisines du deux étoiles, mais à l’arrivé de son fils, elle décide de prendre un peu de temps pour elle. Je ne le regrette pas, mais je ne sais pas si je prendrais la même décision aujourd’hui.

Ce choix va la couper dans son élan. Adieu cuisine de grands restaurants, elle se retrouve sur les chantiers à aider son ex-compagnon. Finalement, ce dernier lui trouve un local dans les quartiers nord de Marseille pour qu’elle puisse lancer son entreprise de chef à domicile.

Coline Faulquier

Photo : © Laura Wetsch

Top Chef.

Un peu perdue, le tournant de sa carrière va se faire par hasard. En 2016, Coline Faulquier voit que l’émission de télévision cherche des candidats. Ce projet la stimule : vivre un nouveau défi en cuisine malgré le manque de soutien autour d’elle. Les gens me disaient que ce n’était plus mon univers, que j’avais quitté les grands restaurants, que si j’allais là-bas, j’allais me planter. Finalement, elle termine finaliste de la saison. Cette force de caractère va la suivre dans tous ses projets.

La réputation acquise grâce à l’émission la pousse à ouvrir son propre restaurant. Par manque d’argent, elle ne peut se permettre un grand local, alors elle rénove l’arrière salle de son entreprise à domicile. Puis, l’image Top chef s’estompe au fil du temps mais pas la réputation de la cheffe. La clientèle est au rendez-vous et la reconnaissance des guides suit. Gault&Millau la classe comme jeune talent en 2017 puis Espoir PACA en 2018.

Retour à la case de départ.

Mais en 2018, un événement personnel la pousse à partir, elle quitte tout sur un coup de tête. Retour à la case départ ! Sa séparation la laisse sans argent. À ce moment-là, je vis un des moments les plus durs de ma vie, mais elle va trouver la force de rebondir avec le soutien de Michel Sarran et Lionel Lévy.

Elle déniche un local, mais les banques font le choix de ne pas la suivre. Peu importe, sa famille et ses proches sont là… Un ami d’enfance lui fabrique les tables en chênes du restaurant, par exemple. Et durant cinq mois et demi, ils vont œuvrer auprès d’elle. Cette période lui donne la passion du bricolage. Carrelage, peinture, électricité… désormais la cheffe touche à tout. Je suis fier de ces instants vécus avec eux. Sans investisseurs, nous avons réussi à construire un beau projet et je ne pourrais jamais assez les remercier.

Signature.

Avec Allan Dupont, son chef pâtissier qui l’a suivi depuis son ancien restaurant, elle ouvre le restaurant Signature en avril 2019. Étoilé en 2021, elle trouve que la récompense arrive peut-être trop tôt. Je ne réalise pas encore. C’est un rêve qui se réalise mais il va falloir se battre en équipe pour qu’il perdure, car l’étoile ce n’est pas moi qui l’ai eue mais nous tous. La cheffe sait qu’elle n’aurait rien pu faire sans sa brigade, qu’elle considère comme sa famille. D’ailleurs, son fils passe beaucoup de temps au restaurant. Il vient les voir en cuisine, en salle… Il apprend beaucoup à leur côté.

Projet.

Pour le moment, Coline Faulquier veut surtout profiter du temps avec son fils, le voir grandir, lui partager ses valeurs et son amour. Parfois, il est compliqué de concilier ma vie de chef avec celle de maman, j’ai dû adapter les horaires du restaurant à ma vie, car je sais que mon énergie, je la trouve en lui.

Mais la jeune cheffe n’arrive pas toujours à se canaliser, surtout quand il s’agit de grandes causes. Elle a un grand cœur et n’hésite pas à participer à des actions caritatives comme le repas des chefs organisé pour les restaurants du cœur. Elle sait qu’avec un peu de temps et de travail, elle peut apporter quelques instants de bien-être autour d’elle. Cette journée n’a pas de prix pour moi, je n’ai pas l’impression de travailler mais d’être libre et de faire ce que j’aime. Et, j’ai tout gagné quand je vois que je peux apporter du bonheur dans les yeux des gens.

Un amour des gens qui se retrouve dans sa cuisine qu’ils nous tardent de pouvoir découvrir dès que les restaurants pourront rouvrir.

Texte Alain Bourdaux – Photos Laura Wetsch
brigadedesgourmets.com

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