Le parcours de Béatriz Gonzalez n’a pas été un long fleuve tranquille. À force de volonté, elle a réussi à relever le défi d’installer sa cuisine en plein cœur de Paris. Portrait de cette cheffe ambitieuse.
Portrait de chef.
D’origine mexicaine, la cheffe grandit dans les cuisines du restaurant familial. Béatriz Gonzalez se rappelle avec affection, les odeurs qui se dégageaient des fourneaux quand sa mère préparait les plats. Excellente cuisinière, elle transmet les premiers gestes à sa fille. La chef Gonzalez nous raconte une anecdote qui l’a beaucoup marqué :
Un jour, je vois arriver plein de nouveaux légumes dont je ne connais pas le nom, ma mère prend le temps de me les décrire puis me dit : « regardes bien, un jour cela va te servir, tu vas te marier et tu devras faire cela tous les jours. ». Finalement, elle avait un peu raison, car ces gestes qu’elle m’a appris je les répète au quotidien.
À 18 ans et sous l’impulsion de son père, elle s’envole pour la France afin d’étudier à l’institut Paul Bocuse. Pendant deux années difficiles, elle va parfaire ses techniques. La barrière de la langue a été un vrai souci pour moi, heureusement beaucoup d’étrangers étudient là-bas et j’ai eu le soutien de Matthieu (Marcant) qui continue à me soutenir dans mes projets et tous les jours de ma vie depuis notre mariage.
En cuisine, la cheffe a une confiance totale
en son équipe.
Expérience.
Après ses études, la cheffe veut mettre à profit son apprentissage, elle part faire ses premières expériences dans de grandes maisons. Elle commence par La belle Otero de Cannes avant de remonter à Lyon pour travailler avec Pierre Orsi, un chef rigoureux et pointilleux, puis elle va enfin rejoindre la capitale pour être sous-chef au côté de Lucas Carton.
Au bout de 5 ans et sous les conseils de son mari, elle décide d’ouvrir son premier restaurant. Matthieu voulait s’installer à Lille, mais pour moi si je veux me faire connaître, c’est à Paris. Ici, il y a des milliers de restaurants et réussir à Paris montre la qualité de mon travail. Je ne me voyais pas officier ailleurs.
La cuisine guide sa vie au quotidien, vivre de sa passion lui offre un plaisir inégalable. Grâce à son implication dans son métier, elle est devenue ambassadrice Lavazza, cette expérience l’a poussée à utiliser le café dont elle est une consommatrice avertie. Je suis une grande fan de café depuis toute petite même si ma mère ne voulait pas m’en donner j’adorais cela.
Elle possède plusieurs restaurants sur Paris comme le Neva ou le corretta où nous avons rencontré Béatriz Gonzalez. La cheffe nous explique rester à l’écoute de nouveaux projets mais qu’elle préfère se concentrer sur sa principale préoccupation : ravir chaque convive en continuant de faire évoluer sa cuisine.
Le restaurant.
Le Coretta se trouve dans le 17e arrondissement de Paris, plus exactement dans la rue Cardinet. Le nom du restaurant est le prénom de la femme de Martin Luther King. Un choix simple car il prend place à côté du parc qui lui rend hommage. Les murs faits de grandes baies vitrées donnent sur l’extérieur et offrent la principale source de lumière même par mauvais temps.
Avec 80 couverts, les deux étages permettent de disposer d’ambiances bien distinctes. En bas, l’architecte a joué le concept de la nature en faisant du restaurant un prolongement du parc avec une retranscription des arbres par les éléments de décoration. Les troncs sont les pylônes et les dalles vertes sur le sol représentent les feuilles. Un melting-pot de tables hautes et basses en bois sous un plateau en acier noir schématise les ombres.
De plus, la cuisine ouverte est un atout, les gens aiment de plus en plus profiter du ballet qui s’orchestre pendant qu’ils déjeunent. En montant l’escalier, nous passons dans le ciel, le mur vitré donne l’impression d’être au-dessus du parc et les tables blanches sont les nuages qui nous entourent. Le design s’adapte au lieu de manière élégante. Depuis 2014, le restaurant propose une cuisine bistronomique et sa cote ne cesse de grimper. Ouvert 7/7 jours pour deux services, les tarifs se situent entre 29,50 € le midi et 41 € le soir.
Aux fourneaux.
Il est midi, les tables sont mises en place en même temps, dans la cuisine le frémissement de l’activité, qui se prépare, se ressent. Le bruit des couteaux parant les légumes sur la planche à découper sonne comme un prélude au concert qui va se jouer dans quelques minutes. 12 h 30, les portes s’ouvrent et il ne faut pas longtemps pour que les premières commandes arrivent.
Chaque cuisinier est prêt. Les entrées ouvrent le bal, tandis que la cheffe pâtissière lance sa première brioche de la journée. Celle-ci doit être commandée dès le début du repas. Elle est faite maison, et il faut au moins 30 minutes au four à basse température pour faire gonfler la pâte.
Les équipes.
La cuisine du Coretta disposée en longueur est divisée en deux zones. Face aux clients, la partie froide et la pâtisserie, les dressages sont finalisés et les plats sortent directement sur le bar ainsi les convives peuvent quasiment parler avec la chef. Cette implantation se retrouve souvent dans les vrais restaurants à sushi. On aperçoit en permanence 3 à 4 personnes, dont la chef. Deux d’entre eux ont la responsabilité des entrées, ils sont placés le plus loin de la zone chaude.
Ensuite, nous avons la chef pâtissière, puis Béatriz Gonzalez qui est le point central, c’est la seule membre de la brigade qui se déplace en continu entre les postes pour vérifier et goûter chaque préparation avant qu’elles ne soient mises dans les assiettes. À l’arrière, on retrouve la partie cuisson, où trois personnes s’activent, les deux premiers se chargent de toute la cuisson pendant qu’une troisième s’occupe des découpes.
Cette organisation permet un roulement rapide des créations. Les cuisines ouvertes imposent une relation de confiance complète entre les équipes, avec elle, on ne peut pas laisser transparaître la moindre erreur, car à chaque service, l’œil attentif et critique du client les observe dans tous leurs faits et gestes. Une pression qui se transforme souvent en motivation à la vue des visages satisfaits des convives en fin de repas.
Texte et photos : Alain Bourdaux
brigadedesgourmets.com
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